Cette étude recoupe une recherche de Master de Recherche en Sciences de l'Education encore en cours. Nous avons pour objectif de présenter le quotidien de « l'enseignement virtuel » au cours de l'année scolaire 2020 dans le contexte de l'école publique au Brésil. Il s'agit d'analyser la façon dont cet « enseignement virtuel », à l'inverse de l'objectif de départ d'apporter une continuité pédagogique, a renforcé encore plus les pratiques pédagogiques dites traditionnelles fondées sur un « output-input » des devoirs scolaires. Nous utilisons comme méthodologie les observations directes des activités en ligne et des entretiens semi-directifs avec des enseignants confrontés à l'enseignement virtuel pendant cette période.
L'année 2020 a été difficile pour l'éducation publique brésilienne car du fait de la COVID, une grande partie des écoles ont dû suspendre leurs activités présentielles et n'y sont toujours pas revenues. L'alternative choisi par le Ministère de l'Education pour la continuité pédagogique a été « l'enseignement virtuel » : les professeurs ont proposé des cours en ligne avec des vidéos-cours enregistrés par eux-mêmes et des documents PDF envoyés aux élèves. Dans ce contexte, les services proposés par certaines entreprises du GAFAM ont été le moyen privilégié pour ce travail pédagogique car le Brésil ne possède pas de plateforme virtuelle nationale dédiée à l'éducation : Google Classroom a été utilisé pour publier les cours, WhatsApp et Facebook pour créer des groupes de classes et organiser les échanges entre élèves et enseignants.
Si l'utilisation de ces applications avait pour but de proposer une continuité de l'enseignement et de maintenir les liens avec les élèves et les familles, le format éducatif proposé par ces grands médias s'apparentait davantage à une sorte de « Foire aux Questions », proche de l'Education Bancaire définie par Freire (1966). Ainsi, de nombreux enseignants ont réduit leur travail à « poster » des activités/documents sur WhatsApp, Facebook et Classroom, que les élèves sont censés imprimer, réaliser, puis qu'ils doivent leur renvoyer par photo ou scan. D'ailleurs, l'évaluation ne consiste souvent qu'en la vérification de « la publication » ou du « repost » de l'élève sur ces différentes applications.
Il semble que ces activités aient beaucoup plus servi les intérêts économiques des entreprises en question, et la forme traditionnelle de l'enseignement, qu'une réelle continuité pédagogique de qualité pour les enfants et les professeurs. Ce mode dégradé, qui se poursuit en cette nouvelle année, conduit à renforcer encore plus les inégalités scolaires et sociales.